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Deux six collés

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Deux six collés

Ces histoires-là sont peut-être réelles, ce sont les quelques récits que j’ai pu recueillir de mon père lorsque, par moments, il a la parole ébrieuse.

 

Deux six collés, un texte acharné sur l'homosexualité

Cet enfant que tu vois là, tu ne connais pas son histoire. Peut-être, de temps en temps, pendant que tu marches ou que tu prêtes l’oreille, entendras-tu quelques bribes de ragots à son sujet. Mais sache que la parole rapportée est une parole bancale et qu’on doit la traiter avec des pincettes. Cet enfant est, peut-être, ce qu’on dit de lui mais qu’importe, n’est-ce pas que chacun à son morceau de métal bien gardé chez l’orfèvre. Pour tout te dire, je connais un peu de son histoire, assieds-toi et laisse-moi te donner un bout.

Cet enfant est né pendant une soirée turbulente du premier novembre. Ses parents étaient de fervents chrétiens et ont vu cela d’un mauvais œil. D’autre en plus, le père, avant d’être subitement converti  au protestantisme, était trempé jusqu’à l’os dans les affaires mystiques d’une secte douteuse. Plusieurs rumeurs à son sujet disaient qu’il était à la tête de la société secrète la plus crainte de tout le pays. On disait que le visage qu’il présentait le jour n’était pas celui qu’il présentait la nuit. Il avait le don de changer sa physionomie en celle d’un chat, d’un chien ou d’une bourrique sans tête mais, selon le ouï-dire, son animal de prédilection restait le chien. Comme je te l’ai dit tantôt, toutes ces informations sont à prendre avec des pincettes. Ce qui en sûr et certain, le père de cet enfant n’était pas un enfant de cœur, c’était une âme ténébreuse qui rampait dans les couloirs de l’obscurité.  Il est devenu un partisan du Christ, un soir où coincé entre la conscience sauvage du canidé et du primate, il eut une apparition céleste, un être de lumière lui avait touché à la colonne vertébrale et lui a dit de laisser ses activités malfaisantes et de le suivre. Il savait qui était cet être de lumière, d’ailleurs après cette apparition, il perdit tous ses pouvoirs de sorciers et fut pendant quelques temps cloué au lit par une maladie que la médecine moderne, aussi subliminale soit-elle, n’arrivait à guérir. Il avait su que c’était l’être de lumière qui le frappait de la sorte, le poussant à obtempérer à sa demande. 

Alors, il a dit oui et c’était un oui résignateur, un faible SOS lancé dans le creux vaste de l’univers. Il s’était rétabli dans la même semaine. C’est alors que naquit le fervent serviteur de Dieu. Le nouveau Moïse sauvé de la mort. Il devint tellement zélé que cela aurait fait jalouser l’apôtre Pierre jusque dans sa barbe. Lui qui ne pouvait décortiquer les tracés sur les feuilles de malanga, sut avec une passion fiévreuse, tous les versets de la bible, faisant frémir l’obscurité qui était quelque part dehors attendant le bon moment de ne faire qu’une bouchée de son âme. 

Cet enfant, mon vieil ami, grandit dans un environnement qui voyait la main divine dans tout et en tout. Austère, il lui semblait que les mains du Christ en la personne de son père n’étaient pas tendues pour le bénir mais pour l’étouffer. L’étouffer dans une dévotion religieuse dont il ne se sentait pas fait pour. Quelque chose d’autre l’appelait. Il ne savait pas encore ce que c’était mais il ne paniqua pas. 

Il attendait patiemment. Son père, totalement livré corps et âme à son Dieu, se voyait gravir les échelons. Il s’était fait sacrer diacre de son assemblée. Quel honneur ! Quelle joie ! Quelle récompense de la part d’un Dieu qui l’avait sauvé de l’enfer. Pour ses débuts sacerdotaux, on lui avait permis de livrer sa première prédication. Lettre au Romain chapitre premier le verset 24 : «  C’est pourquoi Dieu les a livrés à leurs passions secrètes : Ils ont couru à l’impureté, à des vices contre nature.» Il  a particulièrement mis l’emphase sur les vices contre nature. Dans une tempête de postillons, il a mis dans le même sac de dépravation outrancière : les fornicateurs, les masturbateurs, les prostitués et les homosexuels. Invectivant, condamnant comme un juge rigide ces actes abominables qui causaient, selon lui, tout ce mal qu’il y avait au dehors. S’il n’y avait pas les prières des justes comme lui, l’épée de l’Ange de la mort aurait longtemps découpé la terre. Sous la grande acclamation d’une foule galvanisée, le prédicateur fraichement introduit sentait l’esprit de Dieu dans chaque mot qu’il proférait au point qu’il se mit à parler un langage inconnu des hommes. Les « amen » pleuvaient à bâbord et à tribord, comme la manne lors de la grande marche dans le désert.

Mais le diacre ne savait pas que la nature lui réservait une bien malheureuse surprise.  Comme pour mettre sa foi à l’épreuve, la nature, Dieu, le karma, appelle-le comme tu veux, lui présenta ce test qui allait le marquer durant toute sa vie.

Pendant que le père était en train de gravir les échelons dans son parcours religieux, l’enfant que tu vois-là a su identifier la chose qui l’appelait depuis longtemps. Elle se manifesta en lui, dans sa chair comme un soupçon de frisson, une envie, un désir…

Contre-nature.

Il sut qu’il était un homosexuel lorsque Gigi son ami d’enfance l’emmena un jour dans les toilettes et lui présenta son zizi. Il avait tremblé de tout son corps. L’appel qu’il refusait longtemps à entendre prit soudain vie en lui et implosa. Il se mit sans le vouloir à genoux et commença son adoration, une dévotion longtemps retenue. Ils avaient à peine quatorze ans. 

 Eh bien, mon vieux, la servante, malencontreusement en service ce jour-là, les surprit dans leurs vices, ô combien, exultants. Prise d’un mauvais saisissement et d’une envie d’augmentation salariale, elle alla tout déblatérer au père qui se faisait faire, à cette heure-là, sa lecture sainte. Celui-ci fut pris d’un hoquet sauvage qu’aucun liquide ne pouvait apaiser. Il fut pris d’un malaise et sut grâce à cela qu’il était hypertendu depuis des années. Avant de subir sa thérapie, il ordonna qu’on ne nourrisse point l’enfant immoral sous son toit.

Lorsqu’il se rétablit complètement, il appela son fils devant le conseil administratif de l’église, il le sanctionna et le présenta à l’assemblée comme un animal atteint de la peste. Il le renia devant tout le monde, le traitant de gabbage, de chien, de ti koko anba grenn. Des séances ardues d’exorcisme étaient entreprises. Sans succès. L’enfant développait de jour en jour ses caractères efféminés longuement inhibés. On déclara la cause perdue et on le livra à l’enfer. Comme tu le sais déjà, la bouche d’un fidèle protestant ne sait pas contenir sa langue lourde de scoop. La nouvelle s’est répandue  comme une trainée de poudre. On ne parlait que de ça dans la ville. L’enfant fut mis dehors, il erra dans les rues pendant longtemps, subissait en silence les moqueries et les regards dédaigneux. Il avait tout perdu. 

Eh bien, mon ami, cet enfant que tu vois là, dont la langue est pendue, la gorge écrasée sous cette corde et les pieds ballants dans le vide sous le pont, tu passes ta vie à passer à côté de lui, joignant tes moqueries aux autres, eh bien, il ne méritait pas de mourir aussi jeune. 

***

Jacques a dix-sept ans. Il est beau, grand et ses parents sont des personnes de la classe moyenne qui ont pu rentrer dans les bonnes grâces d’un gouvernement fraîchement intronisé et se sont vus attribuer des faveurs ministérielles. Jacques n’avait jamais connu un tel bonheur, en quelques mois, sa vie avait changé littéralement. Ses camarades de classe le regardaient d’un autre œil maintenant et des donzelles qui le repoussaient depuis des lustres, lui faisaient maintenant des avances maquillées. Il avançait sur un petit nuage et il se sentait le roi du monde. La semaine dernière, il avait exigé de ses parents sa première voiture. Apres tout, avoir des gens au pouvoir devrait servir à quelque chose. Il savait que rien ne se faisait à la loyale dans ce pays mais il s’en fichait complètement, ce n’était pas lui qui fourrait la main dans le bol de mantègue. Puis, cela faisait quelques temps que la justice à force d’être pâle a fini par s’effacer. Pour lui, le pays était une mine d’or où la majorité des gens donnait des coups de pioche en espérant tomber sur une pierre précieuse. Il y avait ceux qui piochaient n’importe où, n’importe comment et ceux qui ne faisaient rien, opportunistes et lèche-cul, se virent offrir une vie de Crésus sans effort apparent. 

    Il se dit être trop jeune pour s’adonner à ce genre de réflexion mais c’était pour cela qu’il était le chouchou de ses parents. Il avait un esprit critique sémillant et n’était pas con du tout. Ce soir, il était invité à passer une nuit chez Anderlie, cette fille à la grosse poitrine qu’il avait croisée  sur Facebook. Elle était plus grande qu’elle et pataugeait tête la première dans le bonheur des gens aisés. Ils avaient un peu flirté ensemble. Jacques n’éprouvait pas un grand intérêt pour elle mais c’était une fille de bourgeois, il fallait quand même dorer son répertoire de chasse. Un répertoire qu’il n’avait pas du tout. Jacques n’arrivait pas à se comprendre lui-même, il n’était pas trop emballé par les aventures érotiques. Les fois où il fut obligé de le faire, c’était seulement pour plaire à ses amis. Il avait cette froideur qu’il se demandait s’il n’était pas frigide. 

Dix-heures et demi du soir, il sonna. La porte de la maison s’ouvrit sur le visage radieux et rosé d’Anderlie. Une jolie petite pute bourgeoise, se dit-il. Il coula un regard sur ses seins, s’attendait à recevoir une fatale décharge électrique. Mais rien ne se passa, son corps restait coi, froid comme les couloirs de la morgue. Il pénétra dans la quiétude des lieux, une maison décorée selon un style purement américain, il s’étonna presque qu’on ne lui adressa pas en anglais. Anderlie lui souriait sans arrêts et avait toujours une histoire à raconter. Un vrai moulin à parole. Il se contenta d’écouter sirotant un whisky qu’il n’avait pas le droit de gouter. Mais que seraient les interdictions s’il n’y avait nos jolis petits esprits entêtés. Anderlie s’était tue depuis longtemps, voyant que ses batifolages ne l’intéressaient pas. Il ne pouvait pas croire que cette femme avait cinq ans de plus que lui. La sonnerie tinta, heureusement, brisant le silence qui commençait à devenir assourdissant. 

  • -J’ai oublié de te dire que j’avais invité des amis à nous rejoindre.
  • -Combien ?
  • -Quatre.
  • -Je vois
  • -Cela ne te dérange pas ?

Il croyait qu’elle couinait tellement sa voix se fit petite et flutée. Il haussa les épaules pour dire que cela lui était égal. Elle revint en riant de toutes ses jolies dents accompagnés deux trois hommes et une femme. À la vue de cette bande, un voyant se mit instantanément à clignoter dans sa tête : « Alerte Orgie, Alerte Orgie en vue ». 

Sans même lui demander la permission, l’un des hommes apparemment plus vieux que lui, s’approcha de lui, passa une main autour de son cou, prit le verre dans lequel il était en train de boire, fit le pourtour circulaire de sa langue et le lui repassa. Il ne réagit même pas tant il était étonné d’une telle audace. Il aurait dû l’instant idoine lui écraser le blair avec un bon coup de poing. Mais il restait immobile.  Les autres le dévisagèrent, attendant sa réaction. Anderlie, de son coté,  embrassait à bouche que tu veux la seule femme de la pièce après elle. Elles étaient enlacées dans une étreinte salace qu’on dirait les deux serpents sur le bâton d’Asclépios. Les seins de cette dernière déborda, quitta le tissu qui le retenait prisonnier, les tétons saillants comme du crayon. Ils furent happés au passage par la bouche gourmande de sa partenaire qui, semblerait-il, n’avait pas eu le loisir d’avoir la tétée pendant son enfance.

Jacques regardait le verre qu’un homme qu’il ne connaissait pas venait d’y laisser sa bave. Ne sachant ce qu’il faisait, il porta le verre à sa bouche et but le reste du contenu. Il se sentit immédiatement embrasé au point qu’il eut un hoquet. Ses joues le brulèrent  et il suait à grosses gouttes. Les trois autres quidam le regardaient, visiblement content de l’effet que cela lui faisait. 

  • -Oh, le jeune vient de découvrir sa vraie sexualité dit l’intrépide qui lui avait servi sa salive dans un sourire.

Le moment après, Jacques était dans un autre univers. Il se laissait caresser par des mains, des baisers mouillés en veux-tu en voilà. Il banda comme un cerf. Les filles venaient les rejoindre. Ensemble, à même le sol, ils connurent le jeune, le jeune les connut tous et il connut sa sexualité. Le lendemain, il se réveilla, un autre homme, plus en gaieté. Il savait qui chasser maintenant.

***

  • Masisi sal.

Depuis ce matin, Théophile se faisait insulter. Mais ces insultes-là ne le dérangeaient guère. Il les prit même comme une marque d’affection que lui témoignaient les gens. Cela faisait trente-trois ans qu’il se faisait traiter ainsi, au début, il ripostait avec une rafale d’injures, qui faisait pleuvoir d’autres injures qui engendraient d’autres injures ainsi de suite… le cycle infernal des injures n’est jamais bouclé. Le temps avait fini par lui apporter la paix et la maturité. Les gens ne semblaient même plus être dérangé pour son orientation sexuelle. Il se contentait de sourire avec fierté lorsqu’on lui crachait dessus du « masisi, de sis kole ». 

Depuis ce matin, Théophile marchait pieds nus, un tissu soyeux multicolore lui entourant ses hanches cacopyges, sa peau, usée, virait d’une couleur rougeâtre signe qu’il n’était pas du tout allé de main morte sur les crèmes éclaircissantes. On avait plus de chance de croiser dans cette ville, des homos avec une peau éclaircie, subissant les exigences d’avoir une belle peau. Mais la mélanine qu’ils essayaient de détruire rattrapait tôt ou tard leurs épidermes. Théophile errait, pieds nus, mouchoir noué à la taille, la peau décatie, les yeux embués de larmes, il hurlait de douleur.

Certains gens déjà en leur for intérieur priait ardemment pour que ce soit la fin de cette vieille chose là dehors. D’autres ricanaient, lui aboyant qu’il ne fallait pas folâtrer avec le mauvais bois : «  Bwa sa resi kase nan mouda w, malikong ! ». Il continuait son calvaire, son chemin de croix, hurlant en crescendo.

Un groupe de gens qui vit l’aspect suspicieux de cette lente agonie, pourvu d’instinct plus humain que les autres, s’approcha de lui, s’enquerra de ce qu’il advienne.

  • -Théo, qu’est-ce que tu as à crier comme ça dans les rues. Ton nègre t’a-t-il battu ?

Il fit la sourde oreille et continua de hurler et de se tordre de douleur de plus belle. Dépassé par les évènements et de la tournure des choses, ils prirent la décision que c’était un cas d’hôpital. Ils mirent la main sur lui pour l’emmener au plus vite se faire soigner lorsque celui-ci les repoussa violemment. 

Il se tint le ventre et hurla de plus belle, puis à bout de souffle et sachant qu’il avait tous les yeux braqués sur sa personne. Il dit entre deux hoquets :

  • Mezanmi, se règ mwen m genyen, vant mwen k ap fè m mal. 

On éclata de rire et on laissa Théophile finir sa comédie de la plus déchirante des manières.

***

Le 2 avril de l’année dernière, un tohu-bohu se fit entendre au beau milieu du centre-ville. Une foule amassée, des motos-taxis qui faisaient retentir leurs klaxons en lançant des injures qu’ils n’ont certainement pas appris à l’école. Deux hommes s’embrassèrent dans un bus, la populace a crié au sacrilège. On leur a lancé des jets de pierres. Conscients qu’ils avaient un peu poussé à bout la tolérance des citadines, ils passèrent des jours sans sortir de leurs maisons. Dans une maison bosselée de Martissant, ils attendaient que refroidisse la rage de la presse, des gens et des homophobes au sujet de leurs orientations. 

Durant leurs périodes de réclusion, ils entendirent parler d’un homme de Dieu ayant eu  une vision, il a vu Dieu lui demander de se débarrasser des impies. Cet homme harangua une foule et les convainquit que la seule façon d’être délivré du courroux de Dieu était de retrancher le mal qui sévissait au milieu. On était parti pour une croisade en de temps si modernes. 

On brula des maisons, quelques temples vaudou. En passant, ils brulèrent la maison des deux hommes qui avaient provoqué l’émoi au cœur de la ville. Le lendemain, on relata aux nouvelles que la mort des  deux six collés dans cet acte de vandalisme religieux.

Les deux  malchanceux ne sauront jamais que plus tard, l’homme qui avait signé leurs arrêts de mort fut arrêté pour viol sur un mineur de douze ans. Il n’en était pas à son premier méfait.

***

On lui avait dit de se méfier de Garner. Pourquoi tout le monde lui disait de se méfier d’un homme qui ne vivait que pour le manger et le boire. Les interdictions pleuvaient drus mais personne n’osait lui dire pourquoi il devait prendre ses précautions. Etait-il un tueur à gages ? Non. Etait-il un espion de la CIA ? Non. Etait-il un malfaiteur qui fait des sacrifices humains ? Non. Pourquoi alors tout le monde lui disait de se méfier.

Garner était plutôt un mec amoché, une face de truie, un gros crâne chauve qui se terminait par des mentons en galoche, une grosse bedaine. Bordel, il avait vraiment un gros bide celui-là.

Ce jour-là, Garner le fit appeler. C’était un homme bourré de fric qui lui graissait un peu la patte dans les moments où ses poches avaient de gros trou. En retour, il lui rendait quelques petits services. Lorsqu’il le retrouva, il finissait de manger, il se curait les dents nonchalamment. 

  • -Adam, aimes-tu les femmes ?
  • -Oui boss.
  • -En as-tu déjà baisé ?
  • -Plusieurs, patron.
  • -Sont-elles reparties satisfaites ?
  • -Je n’en sais rien mais elles avaient l’air toutes de prendre leurs pieds.
  • -Aimes-tu les hommes Adam ?

Garner entrepris une succion dégueulasse afin de dénicher un morceau qui était coincé dans l’encoignure de ses dents. Adam déglutit mal, fronça les sourcils, se demandant quel genre de question le patron était en train de lui poser. Celui-ci se leva de son chaise, son pachyderme de rhinocéros le précédant.

  • -Aimes-tu les hommes, mon cher petit Adam ?
  • -Euh… je… je ne crois pas… non, les hommes ne m’intéressent pas.
  • -Je ne t’intéresse pas alors Adam ?

Il n’était plus qu’à quelques centimètres du dénommé Adam.

  • -Je… je ne dis pas ça pa…patron.
  • -Oh que dois-je comprendre finalement ? Je t’intéresse ou ne t’intéresse pas ?
  • -Pas comme une femme patron.
  • -Tu aimes mon argent pourtant.
  • -Il m’aide quelquefois.
  • -Mais moi, je t’aime Adam.

Bordel de merde, il commença à comprendre pourquoi on lui demandait d’éviter monsieur Garner. Il sua à grosses gouttes, les yeux fous, cherchant une échappatoire. Garner semblait avoir compris son jeu. Il lui cloua au mur avec son gros bide. Il croyait en la force de dissuasion de son gros ventre. Peu importe la façon, aujourd’hui, il allait se taper le joli petit cul d’Adam.

– Patron, laisse-moi partir, s’il te plait.

– Oui Adam dit-il doucereusement en lui saisissant les couilles, je vais te laisser partir.

Il se colla à lui, la langue hors de la bouche. Il commença d’abord par lui sucer le lobe de l’oreille. Adam, immobile, allait payer par tous les trous de son corps le chango obèse.

*** 

Il déposa une main sur l’épaule de sa fille. Une main apaisante, réconfortante. Cela fait trois ans que son unique fille avait franchi les lignes de l’Université. Un grand avenir s’ouvrait devant elle, avec son talent, elle allait en un rien de temps faire l’unanimité dans le monde de la peinture. Il voyait déjà les colloques et les salles d’exposition. Il commençait déjà à contacter du monde là-dessus. Il voulait en faire une surprise à sa fille. Tout ce qu’il lui demandait était de travailler sans relâche. Une journée avant le grand jour, elle lui avait demandé une rencontre familiale parce qu’elle voulait leur dire quelque chose d’important. Il était prêt à tout pour sa fille, même à prouver que la terre était plate. Sa fille s’était fait accompagner d’une jeune demoiselle qui la dominait de plusieurs centimètres. Il faut dire qu’elle dominait tout le monde de la maison d’une tête. Il l’avait trouvé particulièrement belle, hormis ses dreadlocks qui lui donnaient un air pas très clean. Il essaya de se délester de tout préjugé. Mais il se dit qu’il était un homme pour qui l’apparence comptait tout de même. 

Sa fille avait commencé un discours en les remerciant de leurs sacrifices, elle leur avait félicité pour leurs mariages et la manière dont ils (sa mère et lui) avaient prouvé que l’amour, le mariage n’était pas souvent un fardeau. Il n’avait pas compris pourquoi le discours de sa fille prenait cette tangente. Il envoya des regards interloqués vers sa femme qui lui rendit le même état de confusion. Sa fille prit la main de celle qui était assis à ses côtés et y déposa un baiser fuyant. C’est à ce moment que le voile se leva de ses yeux. Le reste des paroles fut noyé dans un brouillard de consternation. Il se sentit respirer mal. Il se leva de son siège, prit la main de sa fille et l’emmena dans la pièce où il avait l’habitude de travailler.

  • -Je suis fière de toi, fière du courage que tu as de venir m’en parler. Avouer que cela ne m’inflige pas une certaine peine serait te mentir. J’ai mal, je suis malade à l’ instant où je te dis ces mots. Je n’avais pas imaginé que les choses auraient pu se passer comme ça. Mais bon, ce n’est pas comme si c’est de ta faute. Je t’ai peut-être moi-même façonné telle que tu es. Mais tu dois savoir aussi ce à quoi tu t’engages malgré toi. Tu t’engages dans une voie où tu seras dénigrée, avilie, insultée. Certains hommes ne rateront pas l’occasion de te sauter dessus pour te rappeler qui tu es, de la manière la plus humiliante qui soit. Et toi-même, tu te dois de garder la tête haute, croyant malgré vents et marées que tu es cette fille adorable que j’aimais tant prendre sur mes genoux. Maintenant viens, embrasse ton gros papounet. Tu m’as tellement causé tellement de joie et de tristesse en même temps. Ensuite alors rencontrer ta  très chère fiancée.

 

Lire aussi>>Une seconde d’éternité

Eder A Simphat

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2 commentaires
  1. Salina dit

    Pour ce que ça vaut, J’adore beaucoup le titre. J’ai pris grand plaisir à lire cette histoire comme d’habitude. Certainement, elle regorge des leçons.. continue comme ça Simphat, ta plume est fascinante !

  2. Kety dit

    👏👏👏👏👏j’adore ce texte !

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