A l’ombre de toi
Seule sans toi. Je te regarde sourire de loin, trop loin. Je me surprends à être heureuse pour toi. Tu sais, je ne t’en veux pas. Mon amour c’était de l’encre noire sur un fond pas certain. Pas certain pour toi. Mon tendre amour d’une autre vie. J’ai pris du temps pour m’en apercevoir. Je rêve encore de tout ce qu’on aurait dû vivre et que tu en as décidé autrement. Comment? Pourquoi? Je ne me donne même pas au jeu de la logique. Le sens a perdu son essence. Mon amour… Je perds le fil avec le sang qui coule de mon bras, pâle reflet de mon cœur mais me faire du mal m’aide à me sentir en vie. Je porte mon mal être au bout du regard tout en gardant mon masque de tout va bien… Saurais-tu? Je me berce encore d’illusion. Je suis bête de me torturer ainsi, me dis-je certain soir en m’accrochant à ma lame de rasoir. Je pleure en pensant à toi avec la sensation de fraîcheur qui prend possession de mon avant-bras. Telle une vague calme le soir d’une pleine lune… Il t’arrive parfois de te souvenir de Trou-du-Nord? Les lieux abritent les souvenirs mais faut-il bien avoir de la mémoire pour se retrouver dans les brises du vent et la danse des étoiles sur Port-au-Prince. Seule sans toi. J’ai retourné le miroir pour ne pas voir mon reflet dans la chambre. Je ne pouvais pas me supporter. Mon père faisait son numéro dans la chambre d’à côté et sa fille se tailladait chaque partie accessible de son corps, honte d’elle-même pour se sentir en vie et garder le peu de volonté qui lui restait… Ben, c’est moi. Vous avez deviné… C’est moi entre la dalle glacée de ma chambre, le drap désœuvré et mon silence; je ferme les yeux doucement. La larme glisse involontairement de ma main… Je vois des étoiles. Ton visage dans un beau sourire qui me dit encore une fois désolé et la voix lointaine de ma mère qui criait » Bondye yo manje pitit mwen an «
Jacques Haziel Nédjé
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