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La réunion des femmes battues

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La réunion des femmes battues 

Elles étaient nombreuses à se réunir presque tous les soirs sous cet arbre à l’heure où aucun survivant n’oserait s’aventurer da1ns les rues ténébreuses de la capitale. Elles se racontaient chacune leur histoire, leur vécu et surtout la cause de leur présence sous ce manguier à pareille heure. Martine la plus âgée d’entre elles servait de modératrice ; donnant à chacune l’opportunité de prendre la parole quand c’était nécessaire. Ce soir, la réunion débute avec les pleurs sanglants de Léa, elle était nouvelle et surtout la plus jeune. Léa n’avait que 16 ans, bien trop jeune pour participer à ce genre de rencontre et pourtant elle était bel et bien présente parmi ces femmes. Elles étaient toutes intriguées par la présence de la fille, et attendaient avec impatience son récit, la cause de sa présence dans un endroit pareil. 

Léa n’avait que 14 ans quand ce malheureux accident se produisit. Oui, ce fût un accident d’après son petit ami, car il n’avait pas eu l’intention de la frapper. Les quotes de motivation et de conseil, comme quoi l’amour supporte tout, étaient devenues la seule raison pour laquelle il fallait qu’elle reste dans cette relation, elle devait tout avaler au nom d’un quelconque sentiment. Ce n’était pas de sa faute à lui s’il a failli lui crever un œil mais celle de Léa. Elle n’avait qu’à bien se tenir et éviter de se faire draguer par les garçons du quartier. Après une longue tirade d’excuse et quelques attouchements, certes elle n’a pas oublié, mais elle a pardonné et est restée.

Mais ce qu’elle ignorait, les agressivités ne faisaient pas partie de ce tout que l’amour doit supporter. Elle racontait l’existence pénible qu’elle a dû mener pendant ces deux dernières années. Une jupe trop courte, ne pas répondre immédiatement à un texto, refus d’avoir un rapport sexuel ; ce sont bien des motifs pour occasionner une bastonnade. 

Son histoire était bien différente de ce qu’on avait l’habitude d’entendre ici. Ce n’était pas son mari qui la frappait, encore moins un homme qui l’occupait financièrement, ce n’était juste que son petit ami de trois ans plus âgé qu’elle. Il pensait la posséder, qu’il était maître de son corps car c’est ce que la société patriarcale lui a fait croire et lui a dicté. Qu’il devait se comporter en maitre et seigneur, détenteur de l’autorité supérieure. Il la frappait, violait : Faut croire que les violences ne concernent pas seulement les adultes.  On pourrait croire que Léa était une adolescente livrée à elle-même et qu’elle n’avait pas le choix (on a toujours le choix). Mais rien de tout ça. Elle avait des parents responsables, aimables qui prenaient soin d’elle (aux yeux de la société). Et comment ont-ils pu ne pas remarquer la descente aux enfers de leur fille unique ? Sûrement parce qu’ils étaient trop occupés à chercher le pain quotidien, s’assurer du confort matériel.  

Léa était douée pour cacher les immenses hématomes sous des couches de fond de teint. En deux ans, elle était devenue une professionnelle dans l’art du maquillage. Pas seulement le physique, elle était douée pour maquiller son âme, faire semblant que tout va bien. On n’aurait rien soupçonné du calvaire qu’elle endurait si, un mois de cela on n’avait pas retrouvé son corps sans vie dans une décharge à la sortie de la ville, seulement trois jours après sa disparition. Et maintenant voilà que Léa se retrouve parmi toutes ces femmes battues dont la mort s’en est suivie. Un seul accident toléré est devenu une routine supportée. Cette réunion rappelait à toutes combien le silence peut faire beaucoup plus de mal que de bien et que celui-ci n’est pas toujours la meilleure réponse.

Elles étaient là, parce qu’elles avaient trop longtemps demeuré dans ce mutisme sévère. Et maintenant qui ira dire aux autres que le silence tue? Car là où elles sont, elles font parties de celles pour qui il est déjà trop tard…

lire aussi>> Le Septième jour, elle l’aima

Samantha Marie Judy GEORGES 

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11 commentaires
  1. Sarah Thyrza dit

    Bravo bestie ! 😍😍

  2. Woodlande dit

    Non à la violence ❌❌❌
    Très beau texte ☺

  3. Widles Fils Tanis dit

    Bravo Samantha. Très beau texte!!!

  4. Widles Fils Tanis dit

    Bravo Samantha. Très beau texte.

  5. Sabine dit

    Waw quel beau texte!

  6. Wilguens dit

    C’est un très beau texte, ce qui attire mon attention ladans…c’est de nos jours les parents ne connaissent pas vraiment leurs enfants…contents, joyeux et fiers entendre dans le voisinage qu’ils ont de bons enfants sans même chercher quelle vie qu’ils mènent en dehors du quartier et même dans le quartier. C’est bon de chercher le pain quotient, mais c’est beaucoup plus bon de donner du temps à vos enfants et de les connaître……merci beaucoup ma chérie pour le texte. Keep it up…you’re the best.

  7. Marie Kate Lynn Najna CASTIN dit

    Bravo Samantha 👏👏👏 Très beau texte !

  8. Johanna dit

    Bravo Samie

  9. LOUISIUS dit

    M te byen renmen Léa malerezman li pat wè nan mwen yon nèg ki t ap respekte l😆😆😆😆😀 an pasan s on ti blag
    Samie bon travay.

  10. Samie dit

    Merci James. Léa pat wè lanmou w lan😅

  11. Naïca Pierre dit

    Quelle plume! Je suis trop fière de toi Samie, ça m a donné des frissons 👏🥺😘🔥

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